La directrice scientifique et des collections du Mucem a longtemps participé à « faire dialoguer des collections européennes avec des œuvres du monde entier » afin de « décentrer notre regard » occidental. Toujours, cette même question en tête : « Comment apporter des éclairages différents ? » Celle qui fut formée à l’École du Louvre poursuivra cette quête à Strasbourg. La directrice compte notamment ouvrir en grand les portes des musées à tous les publics : « L’institution muséale ne doit pas uniquement être un lieu où l’on vient voir des expositions. Il faut parvenir à produire une expérience physique, au-delà de la pensée intellectuelle. Il est important de proposer un contenu engageant et impliquant, par exemple en mettant le corps en jeu ! » Pour « On danse ? » en 2019 au Mucem, Émilie Girard, commissaire de l’expo, a imaginé la diffusion d’une boucle vidéo de six heures, projetée sur plusieurs écrans de tailles différentes, invitant le visiteur à picorer des images ou à absorber la totalité du mashup visuel, à s’assoir sur des modules, s’allonger sur une moelleuse moquette, gesticuler sur une balançoire lumineuse ou… danser au milieu d’une scéno pensée pour susciter le mouvement.
Il faut que ça matche !
Autre cheval de bataille de la nouvelle Strasbourgeoise : l’écologie, « sujet essentiel auquel il faut sensibiliser le public ». Pour des expositions éco-conçues et recyclables, « il faut que ça matche entre le commissariat et les scénographes. On doit discuter entre les équipes. » Penser collégialement, avec l’ensemble des services. « À Strasbourg, nous avons une chance incroyable avec ce réseau de onze musées ! Je souhaite créer davantage de fluidité : la pluralité des collections permet de féconds dialogues à imaginer », dit-elle avec une « tendre pensée » pour le volet « arts et traditions populaires » particulièrement bien fourni dans notre ville.
Collecte de désirs
Son exposition rêvée concernerait tous les musées, avec un important et indispensable travail de coordination. Surtout qu’Émilie Girard associerait volontiers un artiste d’aujourd’hui au projet. Des noms ? La directrice n’ose pas se prononcer, préférant sonder ses nouveaux collègues. Ne pas faire cavalière en solo. Elle finira par lâcher : « Jeff Koons, pourquoi pas. C’est seulement un exemple, mais j’ai adoré travailler avec lui au Mucem, il est humainement très touchant et attentif, très loin de l’image de businessman qu’il s’est construite. » Et d’également citer Ilaria Turba, photographe franco-italienne qui a constitué une « collection de désirs » après avoir recueilli des témoignages auprès d’habitantes et habitants des quartiers nord marseillais. « Elle explore la matière. Rend les émotions sensibles. »