C’est une petite fille en noir et blanc, la jupe et les cheveux au vent. Elle laisse s’échapper une baudruche en forme de cœur dont le rouge semble crever le ciel blanc de la page. À moins qu’elle n’essaie, dans un geste suspendu, de la rattraper… Icône du street art, Girl with a Balloon (2006) reste à ce jour l’une des œuvres les plus connues de Banksy, graffeur britannique star et maestro des coups d’éclats.
Cet automne, l’œuvre avait déjà défrayé la chronique lors de sa mise en vente chez Sotheby’s à Londres. Alors que retentissait le bruit du marteau du commissaire-priseur, elle passait entre les griffes mécaniques d’une broyeuse à papier, secrètement dissimulée dans le cadre par son auteur. A peine vendue, partiellement disparue…Littéralement découpée en lanières, la jupe de la fillette (tout comme la partie inférieure de l’œuvre) prenait le pli d’une provocation facétieuse. A la suite de ce happening autodestructeur, Girl With a Balloon a été rebaptisée Love in the Bin. Cette « bombe à retardement » véritable pied de nez au marché de l’art, réaffirme aussi l’impossible domestication d’un art urbain trop souvent pris en otage.
Depuis le 5 février Love in the Bin est exposée au Musée Frieder Burda de Baden-Baden. Présentée pour la première fois au grand public, elle fait l’objet d’une scénographie dédiée « visant à rendre plausibles les motivations et intentions contenues dans l’œuvre » selon le musée. Il sera question de mettre en lumière l’ambivalence du geste de l’artiste qui, paradoxalement, « torpille les stratégies du marché de l’art tout en leur insufflant une forte dynamique » et d’ouvrir la discussion avec une série de conférences autour de l’œuvre désormais culte.
Il reste 3 semaines pour approcher le phénomène et tenter de décrypter les enjeux d’une image qui fait le mur et sort du cadre en même temps !