« Quand je suis arrivée au Nouveau-Mexique, c’était chez moi. C’est devenu mon pays immédiatement. Je n’avais rien vu de tel avant, et ce paysage m’allait parfaitement. C’est peut-être quelque chose dans l’air qui est tout simplement différent. Le ciel est différent, les étoiles sont différentes, le vent est différent. »
Dans cet État qu’elle visite pour la première fois en 1929 avant de s’y installer définitivement en 1940, Georgia O’Keeffe étanche sa soif d’espace et de lumière. Et atteint l’apothéose de son expérience picturale. Élevée dans une ferme du Wisconsin, dans le Midwest américain, puis familière du Lac George dans l’état de New York où elle passe ses étés, elle n’a cessé de peindre la nature, des paysages infinis aux éléments les plus fragiles.
« On prend rarement le temps de voir vraiment une fleur. Je l’ai peinte assez grande pour que d’autres voient ce que je vois. » Cette attention au détail, à la perception et aux sensations qu’elle génère, fait de la peinture de Georgia O’Keeffe une expérience presque méditative, en tout cas spirituelle. Ses tableaux deviennent à leur tour des paysages dans lesquels se plonger et se perdre. Même lorsqu’ils penchent vers l’abstraction, que la réalité se dissout pour ne conserver que l’expérience sensible, ils sont toujours ancrés dans ce qui s’offre à nous. À sa manière très américaine (par ses sujets et sa fidélité à une certaine figuration que l’Europe rejette alors), Georgia O’Keffe trace néanmoins une voie singulière et inclassable, et ouvre la possibilité d’un nouveau rapport à la nature. Pas étonnant que sa peinture connaisse aujourd’hui un vrai engouement, comme le prouve, après celle du Centre Pompidou, cette riche exposition rétrospective.