La route remonte la vallée de la Zinsel. À gauche le ruisseau qui serpente, de chaque côté de la route des arbres majestueux et au-dessus de nous, d’impressionnantes falaises en grès. À chaque intersection, des panneaux indiquent les Maisons des Rochers et laissent à penser que le petit bourg draine bien plus de touristes qu’il ne compte d’habitants. Situé en Alsace, à quelques kilomètres de la Lorraine, il faut dire que Graufthal est aussi connu pour ses nombreux sentiers de randonnée balisés par le Club vosgien et comme destination gastronomique. Un peu en retrait de la route, la couleur bleue des maisons troglodytiques capte le regard et pique la curiosité. Marc Burckhart, l’ancien instituteur, m’accueille devant l’ancienne école du village. Il fait partie des membres de l’association qui assure la mise en valeur de ce petit patrimoine insolite, qui attire quand même 23 000 passionnés d’histoire et de petites histoires, entre mars et novembre.
À flanc de falaise
Le rocher de Graufthal, c’est cette falaise de 33 mètres, au-dessus de nos têtes, vraisemblablement habitée depuis le Moyen Âge «même si à l’origine, on pense que ces excavations servaient plutôt d’entrepôts pour l’abbaye bénédictine du village, explique Marc Burckhart. Au XIXe siècle, cette vallée était très pauvre, les conditions de vie rudimentaires, et c’était finalement plein de bon sens que de se servir de la roche pour maçonner des petites maisons.»
La roche faisait fonction de plancher, de plafond et de mur arrière, il suffisait d’installer un mur de façade, percé d’une porte et d’une fenêtre. Les dernières familles qui ont habité ces maisons ont donné leur nom à chacune : Wagner, Weber et Ottermann. La dernière fut habitée jusqu’en 1958, par Catherine Ottermann, surnommée la « FelseKaeth », doyenne du village.
Abandonnées et presque en ruines, après son décès, il a fallu la volonté d’une poignée de passionnés, puis le soutien du Parc Naturel Régional des Vosges du Nord, pour racheter, entretenir et restaurer ses vestiges, en se basant sur une photo datée de 1875 pour respecter la physionomie des lieux.