
Le Port de Plaisance à Saverne
Il relie Paris à Strasbourg, la Seine au Rhin… Le canal de la Marne au Rhin trouve à Saverne sa halte la plus “wow”, avec accostage au pied de l’impressionnant Château des Rohan.
Natif de Haguenau, Sébastien Loeb – le « Patron » pour les intimes – multiple champion du monde, revient avec plaisir dans la ville qui l’a vu user ses premiers pneus. Portrait d’un pilote avant tout amoureux du geste.
Rien ne change : plus de 10 ans après son premier titre en WRC, le championnat du monde des rallyes en 2004, Sébastien Loeb est toujours prophète en son pays. Nul ne peut oublier les apparitions régulières du champion dans sa ville natale, Haguenau – il a vécu dans le secteur jusqu’à ses 25 ans et est désormais installé à Vaud (Suisse). Sa venue est toujours précédée d’une rumeur (« C’est Sébastien Loeb ?! ») et suivie d’un élan populaire lors de démonstrations rugissantes.
L’Espace sportif Sébastien Loeb – orné d’un rutilant portrait du sportif – où nous le prenons en photo, aujourd’hui occupé par les scolaires, mettra quelques minutes à se vider. Le temps que quelques élèves téméraires osent lui demander quelques selfies et que les professeurs se laissent gagner par la même ferveur : « Si les élèves le font, pourquoi pas nous ? »
Ce succès populaire, Sébastien Loeb le gère avec une distance désarmante, peut-être ce côté cartésien qu’il dit avoir hérité de sa mère. Pudique sur son parcours jalonné de victoires, nombreuses et successives, il semble s’être laissé prendre par la vitesse, sans même en avoir conscience. « Je ne me pose pas beaucoup de questions. Ça reste de la compétition, du sport. Si je gagne, c’est bien. Si je ne gagne pas, tant pis. Ça a sans doute été ma force : je ne me mettais pas la pression, peut-être parce que j’ai gagné tout de suite ? »
En effet, son ascension a été fulgurante : dès ses deux premiers Rallyes Jeunes, la machine s’emballe. « Venu de nulle part », il se retrouve en première ligne au côté d’un Dominique Heintz – amateur de pilotage qui l’a découvert et encadré de nombreuses années – dont on connaît la phrase légendaire : « Soit ce type est fou, soit c’est un génie. »
Un génie qui s’est d’abord essayé à la gymnastique à haut niveau : « J’aurais pu intégrer un centre national de gym à 13-14 ans, mais à ce moment-là, je rêvais juste d’une mobylette. » De son propre aveu, cette pratique de la gymnastique lui a peut-être permis de mieux situer son corps dans l’espace de la voiture. Un détail sans doute, mais qui comme tous les détails a son importance pour celui qui allait devenir un surdoué de la conduite.
Très tôt, il arrête ses études, préférant « travailler bêtement pour pouvoir [se] payer une voiture » et saisit « simplement » sa chance lorsqu’il tombe sur une annonce du Volant Rallye Jeunes. Ce « goût du pilotage », il ne se l’explique pas. « J’allais dans les champs et quand il y avait un virage, j’étais capable de le passer 20 fois pour faire le virage parfait, mais je ne sais pas pourquoi ça me plaisait. » Cette obsession du geste parfait explique-t-elle sa capacité à s’adapter à tout type de route ? Lui qui non seulement est devenu champion du monde à 9 reprises, dépassant ainsi le record symbolique de Schumacher en F1, mais aussi vainqueur sur tous les rallyes classiques et les 6 surfaces différentes du WRC, y compris – une première pour un non nordique ! – les rallyes de Suède et de Finlande. Il y a des chances.
Rétrospectivement, et même s’il affirme que sa carrière est loin d’être finie – sa victoire récente en rallycross l’atteste –, on constate que c’est bien la conduite qui lui importe le plus. Pas tant les voitures, étonnamment. Ni leur esthétique, même s’il peut se montrer sensible devant « de belles lignes ».
Quand on l’interroge avec un brin de malice sur ce qu’il regarde quand il croise une voiture, il répond de manière laconique : « Ben, je repère la portière pour entrer. » Et de nous avouer que s’il ne regarde pas tant les voitures – « Tu sais, il m’arrive même d’être au volant d’une voiture et de ne pas savoir quels sont les sponsors à l’extérieur ! » –, il « aime la course ». Éperdument, presque viscéralement. « Oui, j’aime conduire », insiste-t-il. Sans en rajouter. Le goût du pilotage pur, débarrassé de tous ses apparats.
Par Emmanuel Abela et Cécile Becker
Photo Christophe Urbain