Emily Loizeau au Préo

Face aux désastres actuels, notamment climatiques, Emily Loizeau se ressource dans La Souterraine en espérant léguer un monde plus désirable à ses enfants. Loizeau, au PréO le 4 février…

Portrait d'Emily Loizeau, chanteuse
Emily Loizeau, chanteuse © Yann Rabanier

Vivons heureux, vivons dans l’underground ? 

Quel impact a notre monde sur nos âmes ? J’ai nommé mon album La Souterraine parce que j’aime ces lieux où l’on se cache. Bien sûr, dans La République de Platon, les hommes, dans leur caverne, prennent les ombres pour la réalité et la lumière les aveugle, mais le souterrain est aussi l’endroit de la résistance. L’underground permet de danser pour s’échapper, d’être subversif, de s’évader pour imaginer un monde meilleur à construire, toutes et tous.

Il y a quelques années déjà, nous avions échangé autour de la notion d’héritage. Il est également question de transmission ici… 

Cette question, cette préoccupation, se répète, disque après disque et morceau après morceau… Cette notion traverse mon travail : qu’allons-nous laisser à la future génération ? Il faut garder espoir ! Pour moi, l’écriture est viscérale : elle me permet de prendre ma respiration et des forces. 

Qui est le pire des trouble-fête selon vous ? 

Celui qui nuirait à ce rêve commun de vivre ensemble. C’est le projet le plus sage pour sortir du récit contemporain où l’Homme a besoin de tout posséder et de défendre ses frontières. L’« Autre » est notre partenaire : il faut en prendre soin. Le monde d’aujourd’hui n’est pas bâti sur ce socle, ce respect du vivant, alors que c’est l’unique boussole que nous devrions avoir. C’est la seule clef, le seul défi. 

Votre album est né d’une commande musicale pour une pièce de théâtre, Lazzi, qui parle de la fin d’une époque… 

Lazzi est une allégorie de la fin d’une vision du monde. Dans le spectacle il s’agit de la fermeture d’un vidéoclub, d’une bascule dans l’histoire du cinéma. Le metteur en scène Fabrice Melquiot m’a contactée au moment où sortait mon album Icare dont La Souterraine est une sorte d’écho. Dans Lazzi, j’étais la voix de l’absente, l’être aimé disparu… Après Icare, j’ai continué à tirer le fil pour trouver un autre chemin à emprunter avec La Souterraine en amplifiant la notion d’amour au féminin. 

Ce disque – où on passe de sifflements à des sons noise – est le fruit de votre seconde collaboration avec John Parish… 

Je viens du piano et de la chanson, un univers « classique ». John Parish m’aide à apporter de l’aspérité. J’ai toujours aimé son travail de production pour PJ Harvey : il parvient à glisser du sauvage dans l’acoustique, de l’énergie rock. Rien ne m’excite plus que le son du piano, mais c’est encore mieux s’il est tordu par John. 


Au PréO d’Oberhausbergen
4 février 2025
le-preo.fr


Par Emmanuel Dosda
Photo par Yann Rabanier