L'Hypersensible Gringe

L’Hypersensible Gringe sort un nouvel album et passe par chez nous pour diffuser son « Bad Mood » comme ses « Pensées positives ». Entretien avec un rappeur qui ne veut « pas passer sa vie dans le dark ». Au Point d’eau d’Ostwald (concert organisé par La Laiterie), le 8 novembre. 

Gringe ©Anthony Retournard

Hypersensible, c’est passer facilement du rire aux larmes ?
C’est plutôt un état permanent chez moi. Constant. J’ai comme une petite éponge en moi et lorsque je l’essore, en sortent des morceaux de musique, des films, des livres…

Les dépressifs sont des hypersensibles ?
Les deux sont liés, sans doute, mais la dépression est une maladie. Ma sensibilité a fait que j’ai écouté la petite voix intérieure qui me disait : « Let’s go ! Tu dois accepter de sombrer, te noyer, pour t’en sortir. »

La couv de ton album est un clin d’oeil à Judith décapitant Holopherne…
C’est une idée commune de Lou Escobar, photographe espagnole, et moi. Ma tête coupée est une métaphore : nos êtres qu’on détache de leurs émotions. Pourquoi cette distanciation, favorisée par les réseaux sociaux ? Je pose cette question au début du disque et j’essaye d’y répondre à la fin. Nous vivons une époque d’ombres et de lumières, où résurgent les extrêmes. 

Sur « Du plomb » tu dis ne plus te reconnaître dans ton propre pays…
Je ne suis pas politisé, mais j’ai grandi dans les années 80 auprès d’une mère assistante sociale et d’un père qui travaillait avec Michel Rocard. En termes de progrès, la période actuelle fait bien flipper ! La thune devrait aller dans les hôpitaux ou les écoles, dans le bien commun plutôt que dans les poches des riches. On est du charbon pour la locomotive ! 

Ça te semble loin, Comment c’est loin ?
Mes débuts, Casseurs Flowters avec Orelsan, mon adulescence… Oui, tout ça me semble bien loin. J’ai de la tendresse pour ces moments, mais pas de nostalgie. Aujourd’hui, je suis heureusement plus mature, dans mes amours ou mes engagements, notamment auprès de l’association La Maison perchée qui accompagne les jeunes adultes ayant un trouble psychique. 

Il y a un rapport avec ton frère ?
Oui, c’est en lien avec la schizophrénie de Thibault sur qui j’ai écrit un livre, Ensemble, on aboie en silence. 

Une maison perchée : un endroit idéal pour « Couler des jours heureux » ?
Le lieu rêvé ? Une île déserte ensoleillée, avec ma chérie. Et de la musique : Boys Don’t Cry de Cure. Et aussi un truc à fumer… 


Le 8 novembre au Point d’Eau d’Ostwald (concert organisé par La Laiterie)

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Par Emmanuel Dosda
Portrait Anthony Retournard